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L’aveu de Bill Gates

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De quoi Bill Gates est-il coupable ? 

Le confondateur de Microsoft passe aux aveux... Il est vrai que ça sent un peu le roussi pour lui... certains actionnaires cherchent à l’exclure de la firme dont il ne possèdera plus aucune action en 2018... Quel est donc l’objet de son aveu ? Peut-être la collaboration de Microsoft avec les agences de surveillance américaine, connue depuis au moins quinze ans et la révélation d’Echelon, exposée à nouveau dans les documents récemment libérés par Edward Snowden ? Non, ce n’est pas ça... Alors pour son rôle dans la mise sous tutelle logicielle, privative, de l’informatique grand public ? Non plus... Bon alors quoi ?

Eh bien si le « philantrophe » reconverti bat aujourd’hui sa coulpe, c’est pour une histoire de combinaison de touches sur les claviers de PC... Ctrl+alt+suppr, fameuse combinaison il est vrai, qui permet, depuis Windows 3 et jusqu’aux version XP, 7 et 8, à la fois de se « loguer », c’est à dire de s’identifier pour démarrer une session du système d’exploitation... et aussi d’afficher le gestionnaire des tâches, lorsque ledit système bloque. Ctrl+alt+suppr une fois, et on repère ainsi l’application qui prend trop de place dans la mémoire vive de l’ordinateur et le bloque. Si ça ne suffit pas, on presse alors Ctrl+alt+suppr une deuxième fois, et il redémarre : reboot.

Je tape « admit » admet et « mistake » dans Google, en quête d’autres aveux fumants, sans même préciser Bill Gates, et pourtant les 100 premiers résultats me rapportent cet aveu de Bill, lors d’une conférence à Harvard, il y a quelques jours. Au milieu, on trouve bien un aveu de l’ancien directeur de la banque centrale américaine, qui reconnaît l’erreur de toute une génération de décideurs économiques dans le choc financier de 2008, erreur d’avoir cru que les différentes banques agiraient, en suivant leur intérêt propre, pour le bien commun... Un modèle qui régit le mouvement du monde et qu’Alan Greenspan reconnaissait donc, il y a cinq ans, être vicié en son cœur. Mais passons. L’aveu de Bill Gates, aux yeux de Google, moteur de recherche du temps court, très court, compte davantage.

Pourquoi est-ce intéressant ? Parce que c’est toujours utile de faire la généalogie de nos objets techniques et des technologies pratiquées quotidiennement par des centaines de millions de personnes. Parce que s’intéresser au clavier c’est remonter jusqu’aux machines à écrire, j’en avais parlé plusieurs fois ici ou , c’est constater que l’histoire aurait pu être autre ; Dans le cas précis du ctrl-alt-suppr, je m’enfonce dans l’histoire des microprocesseurs d’Intel et des machines d’IBM. IBM, justement, est pointé du doigt par Bill Gates : ce sont les ingénieurs d’IBM qui inventèrent le ctrl+alt+suppr au début des années 80... Microsoft n’y pouvait rien. Sauf que ce n’est pas tout à fait ça. Ars Technica, dans un article assez pointu qui revient sur l’aveu de Bill, nous raconte, qu’au départ, la combinaison était d’abord pensée pour le BIOS, Basic Input Output System, les fonctions basiques de l’ordinateur, deçà du système d’exploitation... Rien à voir avec Microsoft dans un premier temps donc. Où l’on apprend aussi que cette combinaison a été préférée par IBM à ctrl-alt-escape parce qu’elle oblige à se servir des deux mains, alors qu’avec esc, il y avait un risque de faire une mauvaise manip, en appuyant par mégarde sur la tranche gauche du clavier ; mais surtout, on apprend qu’au moment où sort Windows NT, en 1993, ce n’est plus du tout IBM qui dicte les normes, mais bien plutôt... Microsoft.

S’il avait voulu changer la manière de se « loguer », Bill Gates aurait donc très bien pu le faire lui même. D’ailleurs, la firme de Redmond a fréquemment inventé de nouvelles touches, la touche Menu avec l’icône de Windows... ou des touches pour changer la luminosité de l’écran. Microsoft avait même déjà le nom de cette touche qui aurait pu remplacer le ctrl-alt-suppr : le« Windows Security Button ». Mais le bouton n’a jamais vu le jour. Donc Bill Gates peut bien s’excuser, il est coupable.

Chronique de la « Place de la toile » du 5 octobre 2013
« Proust et les technos »

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