Clowns plaisantins, clowns agresseurs, milices constituées pour les traquer. Une certaine envie d’en découdre. En soignant la mise en scène. Portés par de nombreux groupes sur Facebook, le phénomène, parti des Etats-Unis, est devenu viral, gagnant la France, la Belgique, la Suisse, le Luxembourg où les signalements se sont multipliés, engendrés les uns les autres, tel un mème, phénomène viral propre au Web, motif frappé par un sortilège de duplication. Un phénomène largement amplifié, puisque la police nationale déclarait n’avoir reçu que 19 plaintes. Hier soir, sans doute, Halloween oblige, il atteignit son paroxysme. La police qui, dès le 24 octobre, réagissait sur son site, rubrique « L’actu police » : « Le phénomène des clowns maléfiques » : « Pour signaler la présence d’un clown aggressif, composé le 17 ou le 112 », la palme revenant à la division Pas-de-Calais : « Les clowns qui s’inspirent de Massacre à la tronçonneuse ne sont pas bienvenus devant les écoles ».
Au départ, il y a un projet d’artistes qui photographiaient un clown dans une petite ville de Californie...
C’est la nuit, le cadre est un peu flou, le clown ressemble à un Ronald MacDonald clochardisé, il tient des ballons et on se demande bien ce qu’il fabrique, ce marginal , c’est pas rassurant. C’est ce projet qui a déclenché un début de panique outre-Atlantique, avant d’essaimer internationalement sur les réseaux donc, porté par les vidéos-canulars-à-succès d’une chaîne Youtube italienne, DMPranks, qui filme en caméra-caché des passants surpris par des clowns, porté aussi par une série télévisée américaine, « American Horror Story », porté surtout par l’imaginaire collectif, depuis longtemps marqué par la coulrophobie, la coulrophobie, la phobie des clowns.
Antoine Guillot le racontait sur cette antenne mardi dernier dans sa revue de presse culturelle, en rapportant les propos du patron de Clowns of America International, premier syndicat de la corporation, fatigué de voir Hollywood transformer pour le profit « un métier si bon et pur ».
La BAC, brigade activiste des clowns, présente au Testet on le disait tout à l’heure, à Notre-Dame-des-landes aussi, bref un peu partout où ça lutte, aurait elle aussi des raisons de se plaindre. La coulrophobie a cependant de beaux jours devant elle : le réalisateur de True Detective prépare en effet une adaptation de Ça, le livre très coulrophobe de Stephen King. Autrement dit le clown, victime expiatoire (à ne pas confondre avec la victime d’une bavure policière ou d’un meurtre d’Etat), n’a pas fini de se venger.
Parapluies
L’emblème des manifestations qui ont lieu depuis l’été à HongKong... Le parapluie, qui s’affichait en couverture du Time il y a quelques semaines... Les parapluies ont quelque peu désertés les radars médiatiques ces jours-ci, mais l’ancienne colonie britannique passée sous tutelle chinoise en 1997 est toujours le théâtre d’un mouvement de désobéissance civile : Occupy Central, reprise de l’occupation, entre octobre 2011 et août 2012, du parvis du groupe financier HSBC. La lutte, cette fois-ci, se mène moins directement sur le front des inégalités que sur celui de la représentation politique à Hong Kong : les manifestants, parmi lesquels de nombreux étudiants, aspirent à élire leur représentants au suffrage universel, sans la contrainte de Pékin. Occupy Central with Love and Peace est un mouvement non violent, comme son nom l’indique, ce qui ne veut pas dire qu’il n’a pas à faire à la « violence légitime » comme on dit, aux gaz au poivre (face auquel le parapluie est utile), au gaz lacrymogène (face auquel il l’est moins). Non violent, ce qui ne veut pas dire que le répertoire d’action n’emprunte pas aux tactiques, aux sensibilités et aux modes d’organisation anarchistes, que l’on retrouve là encore, à Notre-Dame-des-landes ou au Testet.